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Henri de Regnier

L'Abandon

Le carrosse d’or roux, la chaise, le sabot
Qui piaffe au pavé clair et sonne sur la dalle,
N’animent plus la cour vaste, vide et royale
Où se sont tus les pas, le fouet et le grelot.

La porte s’entrebâille et le volet se clôt ;
Le vent use, tout bas, la pierre jaune et pâle ;
Le silence engourdi crispe de salle en salle
Ses deux ailes de cendre et sa bouche d’écho.

La fontaine qui chante en gouttes dans la vasque,
Ni le faune qui rit sous le marbre du masque,
Ni le vase fleuri, ni les blanches statues

N’ont pu faire s’entresourire l’un à l’autre,
Lui qui porte un miroir, elle qui s’y voit nue,
La Solitude assise et le Passé qui rôde.

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Les Statues

Les feuilles, une à une, et le temps, heure à heure,
Tombent dans le bassin dont le jet d’eau larmoie ;
Iphigénie en sang près d’Hélène de Troie,
Danaé, Antigone, Ariane qui pleure,

Marbres purs que le vent soufflette ou qu’il effleure !
Si le torse se cambre ou si la tête ploie,
Héroïque au destin qui caresse ou rudoie,
La statue aux yeux blancs persévère ou demeure.

L’éternelle beauté subsiste à jamais belle.
Le Silence a ployé le crêpe de son aile
Et songe, assis, le coude au socle où il inscrit

Le nom de l’héroïne énergique ou morose
Qui dérobe un sourire ou cache un sein meurtri
Derrière les cyprès ou derrière des roses.

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Perspective

Le cuivre du trophée et le bronze du buste
Juxtaposent l’or jaune et la patine verte ;
Le carquois se suspend près de la corne ouverte,
Cérès en fleurs sourit à Diane robuste.

Le parquet de bois clair mire la fresque inverse
Où trône le Héros que la Victoire illustre ;
L’éclair silencieux rôde de lustre en lustre,
Et le soleil s’irise au cristal qu’il traverse.

Le glorieux Passé, nu sous son laurier d’or,
Par les fenêtres, voit se refléter encor,
Dans l’échiquier verdi des portes de miroirs,

Le lys mystérieux du jet d’eau, et, votifs,
Dressant sur le ciel clair leur double bronze noir,
Le cippe d’un cyprès et la stèle d’un if.

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Léda

Au centre du bassin où le marbre arrondi
Entoure une onde léthargique qui tressaille
D’une ride qu’y fait, de son bec qui l’entaille,
Un cygne se mirant à son miroir verdi,

Elle cambre son corps qu’une attente roidit ;
Son pied nu touche l’eau que son orteil éraille,
Et sa langueur s’accoude à la rude rocaille,
Et son geste s’étire au métal engourdi.

Les cygnes nonchalants qui nagent autour d’elle
Approchent de la Nymphe et la frôlent de l’aile
Et caressent ses flancs de leurs cols onduleux ;

Et le bronze anxieux dans l’eau qui le reflète
Semble encor palpiter de l’amour fabuleux
Qui jusqu’en son sommeil trouble sa chair muette.

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Le VÅ“u

N’avez-vous pas tenu en vos mains souveraines
La souplesse de l’eau et la force du vent ?
Le nombreux univers en vous fut plus vivant
Qu’en ses fleuves, ses flots, ses fleurs et ses fontaines.

C’est vrai. Ma bouche a bu aux sources souterraines ;
La sève s’est mêlée à la fleur de mon sang
Et, d’un cours régulier, naturel et puissant,
Toute l’âme terrestre a coulé dans mes veines.

Aussi, riche et joyeux du fruit de ma moisson
Et du quadruple soir de mes quatre saisons,
Je te donne ma cendre, ô terre maternelle,

Pour renaître plus vif, plus vaste et plus vivant
Et vivre de nouveau la Vie universelle,
Dans la fuite de l’Eau et la force du Vent.

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Les Feuilles

Ta robe lente, pas à pas, soulève et traîne
Un bruit de feuilles d’or et de roses fanées,
Et dans le crépuscule où finit la journée
L’automne est las d’avoir entendu les fontaines.

Si tu passes le long des eaux vastes et vaines,
La statue, anxieuse et la tête inclinée
Écoutant dans l’écho le pas de l’autre Année,
Ne te reconnaît plus et te regarde à peine.

La Vestale au ciel gris lève ses yeux de marbre,
L’Hermès silencieux dérobe d’arbre en arbre
Son socle nu de terme et son masque de faune,

Et, dans le miroir clair que tu tiens à la main,
Tu portes, reflétés, le parc morose et jaune
Avec ses dieux, ses eaux et ses verts boulingrins.

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La Rampe

La double rampe, auprès du bassin que surplombe
La terrasse de marbre où le buis nu serpente,
Incurve sa montée et courbe sa descente,
Et de la vasque en pleurs sanglote l’eau qui tombe.

La corneille criarde et la blanche colombe
Alternent, l’une rauque et l’autre gémissante ;
Chaque cyprès, le long de cette double pente,
Figure un cippe noir d’où le lierre retombe.

Si tu descends à gauche et si je monte à droite,
Nous verrons tous les deux, en l’onde dont miroite
La patine d’or vert qu’éteint le crépuscule,

Toi, la Déesse en fuite et moi le Dieu discret,
Statue en marche qui s’avance ou qui recule,
Glisser inversement de cyprès en cyprès.

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Latone

Le quinconce, le buis, les ifs et les cyprès,
La rocaille coquette et la vasque pensive
D’où s’épanche ou jaillit l’onde dolente ou vive
Qui fait l’allée en pleurs ou le carrefour frais ;

La fontaine qui jase et le bassin auprès
Qui stagne et que tarit la fissure furtive,
La statue et l’hermès que la mousse enjolive
Et le parc qui finit en lointains de forêts ;

Le Silence qui songe et l’Écho qui recule
Bercent la douceur d’être en ce beau crépuscule
Où, dans le souvenir, tout reste ce qu’il fut,

Et, parmi l’eau verdie où s’effeuille l’automne,
Toujours s’obstine, en or accroupi, le salut
De l’obèse grenouille à la svelte Latone.

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L'ÃŽle

L’île basse, parmi les eaux, isole en elle,
Sous les pleurs du vieux saule et le frisson du tremble,
Le pavillon carré dont la tristesse semble
Enclore en son secret un silence fidèle.

Par les vitres, on voit, qui se décharne, l’aile
D’une harpe tendre ses cordes où il tremble
Un peu du frôlement des doigts qui l’ont ensemble
Fait vibrer doucement jadis, sonore et grêle.

Et le blanc pavillon de marbre et de cristal
S’est endormi, avec en lui l’accord final
Que le silence embaume en son ombre engourdie ;

Et qui sait si le chant, par la fenêtre close,
N’en filtre pas encor pour charmer l’eau verdie,
Faire trembler le tremble et sangloter le saule ?

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Le Bassin vert

Son bronze qui fut chair l’érige en l’eau verdie,
Déesse d’autrefois triste d’être statue ;
La mousse peu à peu couvre l’épaule nue,
Et l’urne qui se tait pèse à la main roidie ;

L’onde qui s’engourdit mire avec perfidie
L’ombre que toute chose en elle est devenue,
Et son miroir fluide où s’allonge une nue
Imite inversement un ciel qu’il parodie.

Le gazon toujours vert ressemble au bassin glauque.
C’est le même carré de verdure équivoque
Dont le marbre ou le buis encadrent l’herbe ou l’eau.

Et dans l’eau smaragdine et l’herbe d’émeraude,
Regarde, tour à tour, errer en ors rivaux
La jaune feuille morte et le cyprin qui rôde.

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