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Henri de Regnier

Fête d'eau

Le dauphin, le triton et l’obèse grenouille
Diamantant d’écume et d’or Latone nue,
Divinité marine au dos de la tortue,
Dieu fluvial riant de l’eau qui le chatouille ;

La vasque qui retombe ou la gerbe qui mouille,
La nappe qui décroît, se gonfle ou diminue,
Et la poussière humide irisant la statue
Dont s’emperle la mousse ou s’avive la rouille ;

Toute la fête d’eau, de cristal et de joie
Qui s’entrecroise, rit, s’éparpille et poudroie,
Dans le parc enchanté s’est tue avec le soir ;

Et parmi le silence on voit jaillir, auprès
Du tranquille bassin redevenu miroir,
La fontaine de l’if et le jet du cyprès.

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La Façade

Glorieuse, monumentale et monotone,
La façade de pierre effrite au vent qui passe
Son chapiteau friable et sa guirlande lasse
En face du parc jaune où s’accoude l’Automne.

Au médaillon de marbre où Pallas la couronne,
La double lettre encor se croise et s’entrelace ;
A porter le balcon l’Hercule se harasse ;
La fleur de lys s’effeuille au temps qui la moissonne.

Le vieux Palais, miré dans ses bassins déserts,
Regarde s’accroupir en bronze noir et vert
La Solitude nue et le Passé dormant ;

Mais le soleil aux vitres d’or qu’il incendie
Y semble rallumer intérieurement
Le sursaut, chaque soir, de la Gloire engourdie.

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Urbs

Sois nombreux par le Verbe et fort par la Parole,
Actif comme la ruche et comme la cité ;
Imite tour à tour avec fécondité
La foule qui demeure et l’essaim qui s’envole.

Travaille, croîs, grandis ! que ta hauteur t’isole,
Et dresse dans le ciel sur le monde dompté
Ta rumeur obéie et ton bruit écouté ;
Vis. Entasse la pierre et creuse l’alvéole.

Ce soir, Rome debout chante dans ta pensée
Le chant d’or et d’airain de sa gloire passée,
Et la Louve dans l’ombre allaite les Jumeaux.

N’as-tu pas bu comme eux aux sources de la vie
Le désir d’être seul qui les rendit rivaux
Jusques au sang versé sur la terre rougie ?

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L'Escalier

Toute la Gloire avec le glaive et l’étrier,
Et la terre qui saigne et la mer qui écume,
Le feutre balayant le parquet de sa plume,
La Puissance et l’Amour, la rose et le laurier,

De ce songe royal et de ce bruit guerrier,
Soleil d’or qui s’efface ébloui dans la brume,
Il ne reste que l’œuvre anonyme et posthume
Du marteau d’un sculpteur dans le bloc du carrier ;

Et le marbre du buste arrogant et romain,
Sans yeux pour regarder et pour prendre sans mains,
Se dresse taciturne et solitaire, au haut

De l’escalier qui garde à ses marches tassées,
Dans le porphyre roux, la trace sans écho
Du pas sanglant encor des Victoires passées.

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Le Bouquet

Sur la rosace éclose au centre du parquet
Pose ton pied léger, écoute et sois furtive ;
La solitude parle à celle qui arrive ;
N’as-tu pas entendu le marbre qui craquait ?

La harpe tremble et vibre à ton pas indiscret,
Le lustre se balance et son cristal s’avive ;
De ce qui semble mort crois-tu que rien ne vive ?
La glace a son fantôme et tout a son secret.

Le temps passe ; tout fuit ; les choses sont fidèles,
L’invisible silence évente de ses ailes
La poussière pensive et l’ombre transparente ;

Et, sur la table nue où le marbre veiné
A quelque chair ancienne et pâle s’apparente,
Effeuille le bouquet que l’Amour t’a donné.

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Vérone

O Vérone ! cité de vengeance et d’amour,
Ton Adige verdi coule une onde fielleuse
Sous ton pont empourpré, dont l’arche qui se creuse
Fait l’eau de bile amère et de sang tour à tour !

Le dôme, le créneau, la muraille, la tour,
Le cyprès dur jailli de la fente argileuse,
Et tes tombeaux guerriers et ta tombe amoureuse
Te parent orgueilleusement d’un noble atour.

C’est en vain que plus tard ta Sœur adriatique,
Dans la rouge paroi de ton palais de brique,
Incrusta son lion de pierre comme un sceau ;

Son grondement ailé s’est tu dans l’air sonore
Où roucoule toujours et se lamente encore
La colombe plaintive et chère à Roméo.

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Le Repos

Le bronze grave étreint de son sommeil pesant
Ton corps au geste las et ta face verdie ;
Et quelle douloureuse et douce tragédie
T’a faite la statue où tu dors à présent ?

Le marbre de ton socle est rouge et l’on y sent
Partout la pourpre encor d’une tache agrandie ;
Est-ce la flèche aiguë ou la hache hardie
Qui t’a couchée ainsi plus belle dans ton sang ?

Le bronze jaune et vert qui souffre et qui suppure,
Dont s’aigrit la patine et suinte la coulure,
Sculpte de ton repos un cadavre éternel ;

Et la matière où tu survis te décompose ;
Mais, puisque tendre fut ton Destin ou cruel,
Laisse croître à tes pieds la ciguë ou la rose.

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Le Pavillon

La corbeille, la pannetière et le ruban
Nouant la double flûte à la houlette droite,
Le médaillon ovale où la moulure étroite
Encadre un profil gris dans le panneau plus blanc ;

La pendule hâtive et l’horloge au pas lent
Où l’heure, tour à tour, se contrarie et boite ;
Le miroir las qui semble une eau luisante et moite,
La porte entrebâillée et le rideau tremblant ;

Quelqu’un qui est parti, quelqu’un qui va venir,
La Mémoire endormie avec le Souvenir,
Une approche qui tarde et date d’une absence,

Une fenêtre, sur l’odeur du buis amer,
Ouverte, et sur des roses d’où le vent balance
Le lustre de cristal au parquet de bois clair.

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La Neige

La neige astucieuse et le silence adroit
Ont immobilisé au bout de l’avenue
Vulcain jaloux et Mars surpris et Vénus nue.
La Déesse est couchée et l’Amant se tient droit.

Les blancs flocons qui emmaillent le marbre froid
Ont assourdi le guet, le pas et la venue
Et semé des poils blancs dans la barbe chenue
De l’Époux outragé de sa honte qu’il voit ;

Et tous deux à jamais pris aux ruses du piège
Dans l’enchevêtrement du filet de la neige
Restent, couple captif autour de qui Vulcain,

Farouche et les bras nus sous le gel et le givre,
A l’enclume de bronze et d’un ciseau d’airain,
Martèle un parc d’argent et forge un ciel de cuivre.

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Le Passé

Avec des mains de haine et de colère, Amour !
J’ai rompu rudement à mon genou farouche
Le beau cep qui porta la grappe dont toujours
Le goût voluptueux se ravive à ma bouche ;

Et j’ai fait, tout ce jour, des treilles de ma vie
Brûler le sarment sec et la feuille séchée
Pour qu’il n’en reste au soir que la cendre et la suie
Qui demeurent après une vaine fumée.

Et c’est ainsi qu’avant que s’éteignît dans l’ombre
Ce feu dont les tisons ont mordu la nuit sombre,
O Passé, j’ai voulu que ta flamme suprême

Couronnât et rougît une dernière fois,
Comme d’un éclatant et pourpre diadème,
Le visage brûlant que je penchais sur toi.

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